Épatez Papy en lui expliquant le nouveau destin du grisou
Anderlues
Si, hier, les mineurs craignaient le grisou, aujourd’hui, à Anderlues, des producteurs d’électricité l’exploitent honorablement, à défaut de le perdre.
À Anderlues, sur l’ancienne friche minière de la rue Jules Destrée, deux conteneurs reliés à une série de tuyaux ont été installés à côté de la tour de charbonnage. Cette installation, mise en place par Gazonor, filiale de la Française de l’Energie, permet de fournir de l’électricité et de la chaleur pour 1.800 foyers à partir du grisou.
Exploiter le gaz ou le perdre
Le grisou, gaz toxique pour l’homme, se dégage naturellement du charbon. Auparavant, il permettait de détecter la présence de charbon et guidait les hommes pour construire les galeries souterraines. Aujourd’hui, l’exploitation s’est arrêtée et les entrées des galeries ont été rebouchées. Le gaz, quant à lui, de manière naturelle, continue à se propager dans les galeries, là où il y a de la place.
Au fil des ans, on a pu observer l’augmentation de la pression du grisou au sein de ces galeries. Il y a donc un risque de plus en plus élevé que ce gaz s’échappe à l’air libre. « Ce gaz, qu’on nomme gaz fatal, est destiné à disparaître dans la nature sous une forme très polluante », explique Yann Fouant, chef de projet de la Française de l’Énergie.
La solution face à l’augmentation de la pression de ce gaz est de limiter la pollution en le transformant et en l’utilisant.
Ressource énergétique dans nos régions
L’entreprise a donc décidé d’investir les anciens sites de charbonnage, plus précisément les souterrains, et d’exploiter le grisou. Cette exploitation a un double objectif : éviter des fuites et produire de l’énergie. « Avec le grisou, on produit de l’électricité, du chauffage et du gaz. Le grisou transformé pollue nettement moins que si on le laissait s’échapper à l’air libre, comme cela s’observe sur d’anciennes mines de charbon dans le nord de la France », précise-t-il.
Cette énergie, appelée ‘énergie verte’ par l’entreprise, est produite naturellement dans notre sol, principalement dans le bassin du Hainaut, de Mons à Charleroi. « C’est une ressource locale. Qui pourrait prétendre avoir des richesses énergétiques dans son jardin ? » ajoute-t-il en rigolant.
(Presque) 100 % local
Un tuyau de plus de 150 mètres traverse une dalle de béton et descend sous terre. Ce tuyau libère de manière contrôlée le grisou provenant des galeries. Ces dernières s’étalent sur plus 1 000 mètres de profondeur et recèlent énormément de gaz. « Actuellement, le puits est en surpression, autrement dit le gaz compressé sort tout seul dans le tuyau », explique Yann Fouant.
Après avoir été filtré et adapté à la pression des tuyaux, le gaz est acheminé vers deux gros moteurs thermiques pour être transformé en électricité et injecté dans le réseau électrique.
Ce sont les deux premières machines de cogénération en Belgique.
Le parcours de l’énergie entre la récolte de la matière première et sa distribution est donc très court. « Le gaz a parcouru seulement une trentaine de mètres avant d’être exploité. Il n’y a pas de perte, pas de coût ni d’énergie consacrée au transport du gaz. Le bilan carbone est donc minime », raconte ce chef de projet. « Seuls les moteurs sont importés. L’installation et la maintenance de l’exploitation sont réalisées avec des ressources locales ».
Une vingtaine d’emplois ont été développés indirectement autour du site d’extraction. Cela comprend le service de gardiennage, les réparations, l’entretien et l’installation des machines.
Potentiel d’énergie important
Cette zone d’extraction a été inaugurée en mai dernier. Elle pourra fournir du gaz durant 25 à 30 ans. Les prochaines étapes consistent à installer d’autres moteurs. « Face à la quantité de gaz, on pourrait installer jusqu’à 6-7 moteurs durant une vingtaine d’années», explique-t-il.
Un moteur fournit actuellement de l’électricité et du chauffage à 900 foyers.
Par ailleurs, l’entreprise souhaite développer deux autres apports d’énergie : se brancher au réseau de gaz pour utiliser le grisou sans transformation, et exploiter la chaleur produite par les moteurs. « On pourrait imaginer développer un réseau de chaleur ou utiliser cette énergie pour chauffer des serres ou sécher des produits de l’agroalimentaire, par exemple ».
Charleroi Métropole dispose d’autres sites miniers avec un potentiel énergétique similaire, que cette entreprise analyse actuellement.
Contact :
Ancien site de charbonnage
Rue Jules Destrée
6150 Anderlues
La Française de l’Energie
Espace Pierrard
1, avenue Saint-Rémy
57600 Forbach (France)
+33 (0)3 87 04 32 11
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